mercredi 19 novembre 2008

Le sens de la philosophie

Si l'on admet, comme moi, que le mouvement historique est une totalisation perpétuelle, que chaque homme à tout moment totaliseur et totalisé, la philosophie représente l'effort de l'homme totalisé pour ressaisir le sens de la totalisation.
Aucune science ne peut la remplacer, car toute science s'applique à un domaine de l'homme déjà découpé. La méthode des sciences est analytique, celle de la philosophie ne peut être que dialectique. En tant qu'interrogation sur la praxis, la philosophie est en même temps une interrogation - sur l'homme, - c'est-à-dire sur le sujet totalisateur de l'histoire. Peu importe que ce sujet soit ou non décentré. L'essentiel n'est pas ce qu'on a fait de l'homme, mais ce qu'il fait de ce qu'on a fait de lui. Ce qu'on a fait de l'homme, ce sont les structures, les ensembles signifiants qu'étudient les sciences humaines. Ce qu'il fait, c'est l'histoire elle-même, le dépassement réel de ces structures dans une praxis totalisatrice. La philosophie se situe à la charnière. La praxis est dans son mouvement une totalisation complète ; mais elle n'aboutit jamais qu'à des totalisations partielles, qui seront à leur tour dépassées. Le philosophe est celui qui tente de penser ce dépassement.
Sartre

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